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  • : Nankin en douce
  • : Des mini reportages sur la vie et les gens de la "capitale du sud". En marges de l'actualité brûlante pour faire découvrir une Chine tantôt drôle, tantôt poignante.
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13 septembre 2005 2 13 /09 /septembre /2005 00:00

Jogging paradisiaque (3)

Nous avons recommencé à courir. Après tout, nous étions là pour transpirer, pas pour contempler. Nous retrouvâmes des chemins dallés

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et enfin les chemins goudronnés du parc. Petit à petit, les humains réapparaissaient, on en voyait qui se reposaient par terre ou dans des hamacs. D’autres faisaient la conversation à côté de leurs oiseaux en cage. Leurs oiseaux eux-mêmes, peut-être, faisaient la conversation à leur manière.

 

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 A certaines heures, surtout le matin très tôt, les parcs sont remplis de ces cages bleues accrochées aux arbres. Cela fait un grand bruit très joyeux, mêlé à celui des criquets.

 

Puis nous arrêtâmes de courir à la vue d’une femme en blanc, celle-là que nous avions pense sur le point de se marier. Un pan de robe à la main, les pieds découverts, elle accepta d’être prise en photo à condition que je lui montre le résultat. 

 

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 Le fait qu’elle ne semble pas dégoûtée de ma sueur me la rendit immédiatement attachante. Elle nous apprit qu’elle faisait des photos de mode pour un magazine, dans le but de vendre des chaussures. Elle attendait son tour car la photographe travaillait sur d’autres sujets.

 

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Nous reprîmes notre route, mais nous fûmes à nouveau stoppés net par la vision irréelle d’un ange. Un ange particulièrement bien bâti, celui-là, il aurait aisément mis un terme à la querelle médiévale qui divisait l’occident sur la question du sexe des anges, car il était féminin des doigts de pieds aux pointes des cheveux, et jusqu’à la transparence des jupons.  

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Elle semblait nous attendre, mais nous laissa passer sans un regard, comme si nous n’habitions pas la même réalité.

Nous fîmes un autre tour du parc. A notre deuxième passage l’ange était en relation plus étroite avec le photographe.

 

parc-paradis-anges-2.jpg           parc-paradis-anges-6.jpg            parc-paradis-anges-1.jpg 

 

Nous courûmes encore. Nous avions un besoin nerveux de courir, un besoin qui provenait du ventre. Soit nous courions, soit nous restions attachés à ces etres joliment chaussés pour le restant de notre vie.

 

Cependant, nos pas nous conduisirent pour la troisième fois vers l’équipe de photographie. Cette fois l'ange était proche de la photographe, elle la couvrait de sa présence rassurante.

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 La petite équipe tournait son regard vers la deuxième femme en blanc qui, éclairée par le réfracteur de lumière, éclatait d’une gloire nouvelle. Lorsqu’elle regardait le jeune qui portait le réfracteur, il en tremblait et la lumière devenait étincelante.

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Serge et moi nous secouâmes à nouveau pour nous arracher à cette petite famille, nous dégringolâmes et escaladâmes des escaliers pour oublier, nous nous racontâmes des blagues de potache pour nous raccrocher au monde terrestre, nous parlâmes de littérature pour faire comme si nous ne pensions pas à ces jeunes femmes délicates. Mais à force de faire comme si, nous en arrivâmes à parler de littérature pour enfant, nous abordâmes Peter Pan, Le pays où l’on n’arrive jamais, et, sans le vouloir, nous nous retrouvions dans une fantasmagorie, entre rêve et réalité. C’est alors que, dans un endroit tout autre, inattendu, nous tombâmes sur l’ange.

 parc-paradis-anges-10.jpg

 

 

Soit elle possédait le don d’ubiquité, soit nous avions bel et bien versé dans le monde fantastique de l’enfance. Elle avait toujours cette pose noble, ennuyée, un peu hautaine. Elle attendait quelque chose, mais pas nous visiblement. Je n’osais pas la photographier de face. C’est tout juste si j’osais la regarder.

Un peu plus loin, nous revîmes l’équipe qui photographiait une troisième femme en blanc, dans un pavillon.

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Le réfracteur de lumière, tenu à bout de bras, par le jeune homme impressionné par la beauté des femmes, était si lumineux, entre la photographe et la mannequin, que nous étions éblouis par moments.

Serge profita de cet arrêt pour faire quelques pompes. C’est un exercice facile, pour lui, il en fait une trentaine, comme ça, sans échauffement. Ici, il sentait ses muscles lui demander de s’exprimer un peu, de presser hors de lui, comme on presse une orange, la présence d’une puissance insinuante. Derrière lui, les femmes posaient, offraient et prenaient l’image de leur corps sans efforts.

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Pendant ce temps, j’étais rivé sur ce cliché d’une femme en blanc, à une balustrade, le dos un peu cambré. Je me prenais à rêver à de magnifiques romans d’amour. Serge, déjà en couple avec la plus belle femme de Nankin, présentatrice de télévision, moi avec cette Pénélope sinisée, je nous voyais faire des dîner à quatre. Nous nous laisserions dériver sur les remous du charme médiatique de nos femmes photogéniques.

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Nous restâmes longtemps assis sur des bancs, à la regarder. Ces gestes étaient lents. Elle se savait regardée par deux étrangers qui essayaient de n’avoir l’air de rien, avec leur t-shirt trempés de sueur. Nous étions bien loin de ressembler au prince charmant, ou à l’Ulysse, qu’elle attendait dans des poses enchanteresses.

Heureusement, la faim nous tira de notre torpeur.

Nous partîmes sans avoir fait la connaissance de ces demoiselles. Elles auront été, comme le flûtiste, comme d’autres personnes croisées dans le parc du Mont de Fraîcheur, ce 6 septembre 2005 au matin, des personnages d’un voyage réel et paradisiaque.

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12 septembre 2005 1 12 /09 /septembre /2005 00:00

 

J’avais donné rendez-vous à Xu Ning Shu et à Mimique au Palais Présidentiel, pour tourner quelques images et pour enregistrer une interview. Le projet n’était pas précis, il s’agissait de faire un film sur les pierres des jardins chinois. Or, comme les pierres sont censées symboliser l’élément masculin, je pensais faire parler mes amis chinois sur les hommes, les femmes, les pierres et l’eau. L’eau serait l’élément féminin.


Mimique, s’il devait être un élément naturel, se verrait en ruisseau bordé d’arbres.


Ning Shu parle de son futur mari. Elle dit que le sens des responsabilités est la plus grande des qualités, chez un homme, avec l’humour.


Quand la pluie tombe, la pierre trouée et tordue ne retient pas l’eau. La pluie entre en contact avec la pierre, s’y introduit mais n’y stagne pas. Elle retourne à la terre.


Ning Shu : L’eau s’échappe, l’eau s’écoule, elle ne reste pas sur les pierres, mais l’eau a laissé des signes sur les pierres. Des trous.

Moi : Des signes ?

Ning Shu : Oui.

Mimique : Traces.

Moi : Des traces.

Ning Shu : Des traces.

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11 septembre 2005 7 11 /09 /septembre /2005 00:00

Un jogging paradisiaque (2)

Il arrive que, lors d’une promenade ou d’un jogging, on aperçoive des petits chemins de terre qui s’enfoncent dans les bois. Il arrive qu’on soit assez en forme, et attiré par des aventures nouvelles, et qu’on les emprunte. Une autre motivation me guidait : j’avais essayé d’uriner dans les toilettes du parc, mais l’odeur était trop forte et les mouches bien trop grosses et nombreuses, je ne pouvais décemment pas sortir mon sexe devant toutes ces pairs d’yeux, appelez cela de la pudeur, de l’inhibition, peu m’importe. Je me soulageai parmi les arbres. Dans cet instant d’immobilité, je perçus une petite musique, au loin. Un son de flûte chinoise, très aigu. Serge l’entendait aussi.

 

 De petits chemins en petits chemins, on tombe sur des axes de communications inconnus qui frôlent la ville, à l’extérieur du parc, et qui, peut-être à cause de cela, sont plus sauvages, presque abandonnés. 

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  Nous marchâmes encore, dans la direction du son, que perdions et retrouvions selon les plis de nos zigzags. Nous passions de chemins dallés à des chemins de terre, à des endroits sans chemins. Nous vîmes une étrange forme dont Serge pensait qu’il s’agissait d’une cloche.

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 Dans des temps anciens, on aurait frappé ce champignon de bronze pour donner l’heure, ou pour prévenir d’un incident ayant lieu de l’autre côté de la colline « de la Fraîcheur ». Ce bois était étonnamment grand, pour un parc urbain. C’est tout juste s’il n’était pas possible de s’y perdre, alors même qu’on sentait la ville autour de nous. Soudain, un espace s’ouvrit dans le bois.

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 Sur la terre ocre, une variété d’arbres et de plantes disposés sans ordre, mais offrant une curieuse harmonie. C’était comme un jardin dessiné par un fou. Nous traversâmes cet espace et, à nouveau dans le bois, je vis une forme à travers les branches, que je pris pour le flûtiste.

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 Il s’exerçait, seul, dans la nature, le plus isolément possible. Dans un roman d’André Dhôtel, cela déboucherait sur une conversation troublante, le flûtiste aurait un lien de parenté avec la copine de Serge, par exemple, il serait annonciateur de je ne sais quel prodige. Ici, non, il n’était qu’un musicien, mais cela suffit à nous émerveiller.

Nous l’écoutâmes un instant, mais notre présence le gênait peut-être. Il accepta que je le prenne en photo, mais il me tourna le dos.

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 Clairement, nous étions de trop dans son univers. Nous déguerpîmes sur la pointe des pieds. Malgré tout, nous nous sentions dériver dans un autre monde.

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10 septembre 2005 6 10 /09 /septembre /2005 00:00

Je voudrais réagir aux quelques commentaires qu’a suscité mon article Femmes blanches. Merci, tout d’abord, de vous être exprimé, et d’avoir ouvert un riche débat. Trop riche pour que je puisse reprendre tout ce qui a excité ma réflexion, (car presque tout mériterait qu’on en discute.) Aujourd’hui, je ne discuterai qu’un point.
Ce que Fanette dit de l’attirance des femmes blanches pour les hommes asiatiques, voilà un problème très mystérieux. L’immense majorité des femmes occidentales avouent ne pas être intéressées par les Chinois. Elles les trouvent trop gentils, trop polis, manquant de virilité (ce qui en dit long sur les stéréotypes qui président aux fantasmes de ces femmes.) Une minorité pense, au contraire, que les Chinois sont attirants, mais rien ne se passe entre elles et les hommes en question.
Pourquoi n’y a-t-il pas de couples hommes chinois / femme occidentale ? Il n’y a pas de mariages, pas d’enfants, pas de concubinage, pas d’aventures, pas de passion, pas de sexualité, pas de promenades main dans la main, quasiment pas de flirt et très peu de tentatives réelles de séduction. Il y a certainement des exceptions, mais enfin la réalité est là : les échanges entre hommes d’occident et femmes de Chine sont multiples, variés, ils présentent tous les aspects des relations amoureuses ou sexuelles entre hommes et femmes en général (je dis bien tous : de la prostitution à l’amour platonique et à l’amitié pure et simple, en passant par des histoires d’amour de toutes sortes) ; cependant les échanges entre hommes chinois et femmes d’occident n’existent que dans les fantasmes, les livres et les films.
(Je ne parle que des hommes chinois car je ne connais rien des autres nationalités asiatiques, et uniquement des Chinois de Chine, non des Occidentaux d’origine chinoise, car la culture commune fait passer au second plan la différence ethnique.)
Pourquoi les femmes ne passent-elles pas à l’acte ? Je me le demande et le regrette sincèrement. Cela équilibrerait les choses, rendrait la vie en Chine encore plus joyeuse et serait peut-être une belle étape dans la libération des femmes.
A l’autre bout du problème, on peut se demander : les hommes chinois sont-ils vraiment attirés par les femmes d’occident ? Ils fantasment certainement, mais sont-ils prêts à faire le pas, à apprendre de nouveaux gestes, de nouvelles attitudes, à avoir une relation égalitaire ? Se sentent-ils « à la hauteur », pour reprendre l’expression de Fanette ? Dans tous les cas, ils ne bougent pas et, quand ils parlent de femmes idéales, ils évoquent les Coréennes, voire les Japonaises, car ils les perçoivent comme belles et « traditionnelles ». Une exception, qui n’en est pas une : le succès indéniable des entraîneuses blondes dans les boîtes sordides de province.
Que vienne le temps d’un désir plus mondialisé et mieux réparti.

 
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9 septembre 2005 5 09 /09 /septembre /2005 00:00

Un jogging paradisiaque (1)

Mardi 6 septembre 2005, mon ami Serge et moi avons connu le paradis. Nous avions seulement prévu de courir dans un parc. Nous avons choisi le Qingliangshan gongyuan, c’est-à-dire le Jardin du Mont de Fraîcheur.

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 Depuis la porte d’entrée, plusieurs chemins sont proposés, plusieurs collines. Nous empruntâmes des escaliers sur la droite, escaladâmes la colline principale et en fîmes le tour rapidement pour revenir à la porte d’entrée. D’autres chemins nous menaient alors à des temples, des musées, des jardins d’acclimatation.

parc-paradis-archi-2.jpg          parc-paradis-statue.jpg         

Serge faisait toute sorte d’exercices corporels, il était increvable. Moi je prenais des photos pour souffler un peu.

parc-paradis-s3.jpg                 parc-paradis-s1.jpg               parc-paradis-s4.jpg

Au sortir d’un virage, nous croisâmes un groupe de trois femmes et un homme. Deux femmes étaient en blanc, nous pensions qu’elles étaient sur le point de se marier. Je m’en suis voulu de ne pas les prendre en photo. On rate ainsi souvent des occasions de fixer ce qui nous intéresse vraiment.

D’un naturel peu sportif, je tends à m’essouffler rapidement, c’est pourquoi je me force à courir, pour lutter contre l’apathie de mon corps, lui donner de la force, du souffle, de la résistance. C’est donc un émerveillement pour moi de courir et de jouir du paysage, en oubliant que je cours. Mes paysages, ce sont des chantiers, bien sûr, des détails d’architecture baignés de verdure.

 

 

 

   parc-paradis-archi-4.jpg               parc-paradis-erection-toit.jpg

Le paradis, pour moi, c’est un morceau de montagne, quelque part dans le Massif Central, où des ouvriers sympathiques construisent des murs et des cabanes.

 

 

 

 
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8 septembre 2005 4 08 /09 /septembre /2005 00:00

Voici un petit choix de phrases, lues sur les fiches d'étudiants de troisième année, dont je vous laisse l’entière interprétation.

1) Dans la catégorie « Qu’aimeriez-vous faire plus tard ? »

 

Je désire que je peux gérer un grand restaurant

ou un hôtel très grandiose.

Profession désirée : Professeur/Voyageux

Je voudrais devenir la patronne du bar.

 Contribuerai à mon pays, deviendrai un fonctionnair

Je voudrais faire la recherche économique pour lever le niveau de vie des paysants chinois.

 2) Dans la catégorie « Qu’aimeriez-vous faire dans le cours d’audio-visuel cette année ? »

  Cette année, j’espère qu’on peut voir le film.

Voilà. Comme ça.

Je voudrais voir des films célèbres, surtout celui qui ne sont pas faciles à comprendre. Mais je n’aime pas voir toujours les films de ce genre, et je n’aime pas que le professeur cesse de faire quelque chose entre l’épisode. P.S. Je préfère aussi les films intéressants.

Je veux bien renforcer la capacité de communication avec les Français. C’est-à-dire que je puisse les comprendre sans difficulté dans la vie quotidienne. Et vice versa.

3) Dans la catégorie « Généralité »

  J’espère bien que vous ne nous laissiez pas trop de devoirs à faire en dehors des cours, parce que les compositions semblent faciles pour vous mais difficiles pour nous. J’espère aussi que vous parliez beaucoup en classe, nous aimons vous écouter.

Merci, nous vous aimons beaucoup, vous êtes aimable.

 Si j’ai choisi le français comme spécialité il y a deux ans, c’est que j’ai entendu dire qu’il est considéré comme une des plus belles langues du monde. C’est vrai ça ? Aujourd’hui, je réponds : « Peut-être, oui. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 
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7 septembre 2005 3 07 /09 /septembre /2005 00:00

Un premier jour de travail, dans un nouveau lieu, c’est toujours grisant. Je suis monté au septième étage de l’institut des langues étrangères de l'Universite de Nankin, une demie heure avant mon cours, pour prendre le pouls, m’imprégner de l’ambiance du lieu. C’est l’étage où j’avais eu mon entretien d’embauche, où se trouve la photocopieuse, ce genre de choses. Je fis rapidement le tour de l’étage, qui n’eut rien à m’offrir. Je descendis alors au quatrième étage où je devais avoir cours.

 

 

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C’était un autre monde. Autant le septième étage était propre, distingué, autant le quatrième était délabré. En travaux, dirons-nous. Comme j’avais oublié le numéro de ma salle de cours, je visitai un peu. Les couloirs étaient encombrés de gravats, d’escabeaux, de morceaux de bois. J’entendais, depuis l’intérieur des classes, parler espagnol. J’entrai dans des salles, au hasard, où de jolies étudiantes étaient assises et attendaient je ne sais quoi. Peut-être mon cours ? Je demandai si elles attendaient leur cours de français. Elles répondirent qu’elles ne savaient pas. Je les remerciai et partis du bâtiment. Je rentrai chez moi pour vérifier quelle était ma salle.

 

 

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Les étudiants sont déjà excellents en français, ils font peu de fautes, nous passerons l’année à écrire, quoi de plus beau ?

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6 septembre 2005 2 06 /09 /septembre /2005 00:00
J’ai revu cette ancienne étudiante qui m’avait enlacé au Lac des Nuages Pourpres (voir l'article Le Lac des Nuages Pourpres.) Il n’était plus question d’érotisme entre nous, je lui avais dit que j’étais trop vieux pour elle. Quatorze ans d’écart, cela devenait gênant. Elle me présenta un jeune Français : « Mon copain », dit-elle. J’étais sincèrement content pour elle, elle était jolie et pimpante. Vraiment une belle plante. Je considérai une seconde son grand dadais d’amoureux. Un enfant, un visage glabre aux lèvres humides, des yeux peu ouverts sur le monde, un blondinet d’un intérêt difficile à repérer. Du point de vue de l’âge, ils étaient incontestablement bien appareillés, mais ce garçon était un gamin, un bébé d’un mètre soixante-quinze. Etait-il seulement capable d’apprécier à sa juste valeur la grâce de cette fille, la grâce maladroite de ses grandes mains ? Elle posséde le charme des gens grands, un manque d’aise dans les manières qui lui donne un air rêveur, ou spirituel. Elle-même n'est pas consciente de ce charme, bien entendu, et elle balance ses bras, les entortille comme des membres surnuméraires.
 
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4 septembre 2005 7 04 /09 /septembre /2005 00:00

Samedi 4 septembre, il pleuvait. Du réveil au coucher, il a plu, d’une longue averse tropicale, calme, sereine. Selon l’endroit où on se trouve, la pluie est vécue comme ennui ou comme bienfait. En Irlande, elle fait partie de la vie quotidienne, mais on ne s’y fait pas, on jure contre elle, les filles ne prévoient pas de parapluie, elles veulent croire que le soleil du matin persistera, que ce sera une belle journée de printemps qui fera resplendir leur beauté renouvelée. Elles sont surprises à grimacer en milieu d’après-midi, sous les trombes d’eau qui ne durent pas longtemps.
Ici, bien qu’il pleuve moins souvent qu’à Dublin, tout le monde est muni d’un parapluie et la pluie n’énerve personne. Après tout, c’est elle qui a rendu la région fertile, la richesse du Jiangsu lui doit tout, ce qui n’est pas le cas du « Celtic Tiger ».
Ici, j’aime la pluie, j’aime la longue journée de pluie. Je reste à l’intérieur et la pluie semble me dire : « Va, tu peux lire tant que veux, je m’arrange pour que rien ne te distraie. Je ne m’arrêterai que lorsque tu auras terminé. » J’ai donc lu un très beau roman : L’enfant éternel de Philippe Forest. Je ne le conseille pas à ceux qui ont des enfants en bas âge, mais uniquement à tout le reste de l’humanité (s’il lui arrive de lire ce blog.) Je ne partage rien avec le narrateur : je ne suis pas marié, pas père de famille, pas riche, pas catholique, pas universitaire, pas du tout admiratif de Philippe Sollers. De plus, dès qu’on me parle de maladie, fût-ce d’un torticolis, je manque tomber dans les pommes. Et pourtant, génie combiné de la pluie nankinoise et de la littérature, j’ai été emporté par cette histoire de petite fille qui meurt d’une grave maladie.
Le soir, je me suis réservé une petite fête intime, solitaire, comme je sais m’en offrir. J’ai mis le livre sous ma chemise, fait entrer ma chemise dans mon pantalon, j’ai enfilé ma grande cape imperméable et je suis allé me promener à vélo dans la nuit et la pluie tombantes. Mon esprit, calmement, passait du souvenir du livre que j’étais en train de lire au restaurant qu’il me fallait choisir. Je resserrais le plus possible la tension entre passé et avenir, plaisir littéraire, plaisir du palais, les deux concentrés en moi, se mêlant aux impressions de la ville en mouvement. J’ai continué ma lecture dans le meilleur restaurant italien de la ville, Bella Napoli. Pour lire, la pizza est ce que je préfère car on la mange d’une main tandis qu’on tient son livre de l’autre. Que les autres clients mangent avec des fourchettes et des couteaux m’est profondément indifférent. Je sentais que les quelques Italiens présents, accompagnés de leur épouse chinoise, m’approuvaient silencieusement.
Une jeune Américaine, à la table voisine, faisait trop de bruit, elle parlait excellemment chinois, avec deux amies, et voulait que tout le monde le sache. Je la regardais, sans envie et avec désolation. Les exhibitionnistes, tout pénibles qu’ils sont, sont tellement fragiles. Son visage ne tenait pas en place, son excitation et ses rires sonores n’étaient pas communicatifs, ses amies chinoises restaient de marbre et mangeaient poliment.
L’enfant éternel avait des chapitres tellement émouvants que c'etait, par moment, difficile de garder le livre en main. Ou simplement, des phrases, des observations, m’obligeaient à lever la tête et regarder ailleurs, dehors, la pluie tomber, ou mon Américaine. Ce bouquin tirait des larmes au dur à cuire que je suis. Il était temps de rentrer chez moi me faire bercer comme un enfant par la musique de la pluie sur les vitres.

 

 
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3 septembre 2005 6 03 /09 /septembre /2005 00:00
Pour la première fois, je fais un appel aux lecteurs de ce blog. Que pensez-vous, en quelques mots de François Jullien ? Certains amis me manquent pour en discuter. Quelqu’un comme Ben, qui a tout lu sur la Chine, et dont la culture philosophique est vaste, saurait en parler, autour d’une bière.

Je suis dans un dilemme. Je trouve ses livres assez intéressants, leur lecture n’est pas inutile, on y glane des informations, des citations, des lambeaux de théories qui font réfléchir.

Mais des choses me chiffonnent. J’ai toujours cru que Jullien était un sinologue distingué, c’est ce que les articles de presse laissent penser. Or, les sinologues disent qu’il est avant tout philosophe. Et les philosophes, évidemment, pensent qu’il est sinologue. Il se tient à la frontière entre ces deux disciplines, ce qui est lui permet de dire des banalités qui se donnent des airs, soit de pensées profondes (ce qui n’est jamais le cas), soit de rares découvertes (qui sont en fait  choses très connues du moindre étudiant en chinois.) Et quand ce ne sont pas des banalités, ce sont des approximations.

Un exemple : la fadeur, à laquelle il a consacré un petit livre.

C’est une notion intéressante, mais Jullien y range trop de choses. Sous prétexte qu’on trouve chez Lao Zi et chez Confucius une utilisation de la fadeur pour illustrer une idée, Jullien l’étend à quasiment tout. L’équilibre devient fade, l’harmonie devient fade. Une musique est dite fade parce qu’elle est jouée en sourdine, parce que les sons, étant peu expressifs en eux-mêmes, donnent une impression de surplus de son.
Un très beau passage des Entretiens de Confucius est invoqué, où le maître dit que son désir serait de se baigner dans une rivière, de chanter et de danser. Je ne suis pas convaincu une seconde que cela soit fade, quelle que soit la définition qu’on en donne. 
Meme chose pour cette anecdote : un homme joue d’un luth sans corde. Il n’y a pas de son, certes, mais est-ce au même titre que la fadeur qui n’a pas de saveur ? Pour moi un homme qui joue d’un luth sans corde, c'est savoureux, c’est de l'art contemporain, une sorte de happening new yorkais, mais dans les brumes de Tai Shan. C'est du John Cage, du Fluxus avant l’heure !

J'y pense : Nam Jun Paik, il était bien coréen ? Son travail artistique des débuts, avec des pianos et des violons qu'il détruisait sur scène, cela venait peut-être d'une conception chinoise de la musique sans corde et du geste vide... Je ne sais pas trop si ce type d'hypothèse est à creuser.

Mais peut-être que les intuitions de Jullien m’auraient plu si elles avaient été écrites dans des formes de petits essais, de tentatives modestes, des sortes de théories portatives, au lieu de donner dans un style universitaire, grandiloquent et vain.

Enfin, voilà, j’ai vraiment besoin de l’opinion de ceux qui en ont une sur le sujet.
 
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