Faire des paradis, c’est certainement une des tâches de l’écrivain postmoderne (et je ne parle pas particulièrement de Philippe Sollers, que je n’aime pas beaucoup.) Ce n’est pas une fuite devant la réalité, ce n’est pas un refus de l’engagement et un refus de la politique, car il s’agit d’expériences très concrètes. Le paradis est un lieu qui provoque chez vous une joie pleine, une jubilation de bébé, un émerveillement qui donne envie de crier, comme au bord du lac des nuages pourpres.
On peut trouver facilement des métaphores d’une vie paradisiaque : souvent il faut de l’eau, une femme, de la nourriture abondante. Etre sur une falaise avec une amoureuse avant qu’elle n’exige de la communication dans le couple (le moment de la communication, c’est le purgatoire, l’enfer commence quand les femmes demandent qu’on les écoute.) Ecouter du reggae dans une voiture qu’on vous prête sur les routes des Cévennes. Se réveiller au milieu des montagnes et attendre qu’on vienne vous chercher.
J’ai voulu faire de Nankin un portrait paradisiaque, selon ma conception du paradis. Une géographie minutieuse et tortueuse, un lac, une rivière et une montagne, des femmes, quelques amis, des festins invraisemblables, des jardins, une langue musicale et cruelle, une forme d’art inexplicable.